Coup de pouce à l'école de Ban Houay Thong !
Vendredi 5 décembre – Juste après mon massage, sur la terrasse du restaurant. J-13 !
Ce matin, c’était grasse matinée pour tout le monde jusqu’à 8 heures, l’heure à laquelle le petit déjeuner est servi… sauf pour votre serviteur qui, à 6 heures, est allé trier les photos des 10 derniers jours. J’avais pris pas mal de retard mais je suis maintenant à jour.
Quelques gouttes sont tombées ce matin formant dans la piscine, de multiples ondes de choc qui se dissipaient au fur et à mesure que leurs couronnes s’agrandissaient. Cela n’a pas duré bien longtemps et le ciel s’est rapidement éclairci tout en restant gris. Les nuages restent accrochés aux sommets des montagnes qui nous entourent mais le ciel est lumineux. A 10 heures, nous quittons tous les cinq le lodge pour une randonnée de 3 heures qui doit nous mener aux chutes de Tad Thong.
Après avoir rejoint un premier sommet, nous atteignons un large replat de terre ocre d’où nous distinguons au loin la ville de Luang Prabang et le Mékong.
Nous redescendons ensuite vers un chemin de terre carrossable qui nous mène jusqu’à l’entrée du petit village de Ban Houay Thong d'où nous croiserons queques buffles en train de paître dans un champs de riz récemment fauché.
Cela faisait un moment que nous n’avions pas randonné et nous marchons d’un pas alerte. Heureux d’être là.
Sur le bord de la route, nous apercevons un bâtiment qui ressemble à une école primaire. Il semble qu’il n’y ait pas d’enfant mais une mobylette est posée contre le mur. Nous osons pénétrer dans le pré qui fait office de cour de récréation et passons une tête à l’intérieur du bâtiment. Un jeune maître d’école, pantalon et chemise beige impeccables, nous adresse un large sourire.
Il ne parle pas bien anglais mais baragouine quelques mots. A l’aide de termes simples, de signes, d’expressions du visage, de mots ou de chiffres écrits à même le sol, nous tentons le dialogue et finalement, nous nous comprenons. Kham Seng a 38 ans. Marié à une jeune femme professeur également avec qui il a 3 enfants - 2 garçons de 11 et 4 ans et une fille de 9 ans -, il semble ravi de rencontrer du monde. Il est 11 heures 30, les enfants viennent de quitter la classe pour le déjeuner et finalement, nous comprenons qu’il a deux heures libres avant que les enfants ne reviennent à l’école pour l’après-midi qu’il souhaiterai occuper en nous accompagnant jusqu’aux chutes. Nous sommes ravis qu’il se joigne à nous et lorsque nous pénétrons dans le village à ses côtés, nous avons l’impression d’avoir un sésame de libre circulation. Nous saluons les gens et sommes autorisés à prendre des photos à chacune de nos demandes.
Le village abrite 78 familles et la plupart des maisons sont construites en bois et en bambou avec des murs tressés et des toits en paille.
La plupart le sont sur pilotis pour parer aux épisodes de mousson. Ce village, niché au cœur des montagnes laotiennes, semble faire partie des derniers remparts d’une civilisation qui appartient déjà au passé en dépit, ça se sent, d’un attrait grandissant pour le progrès. A l’instar des pays émergents, ces villages semblent être prêts à se s’adapter rapidement à la modernité… mais je pense que la société de consommation les a rattrappé… voire même dépassé. Presque toutes possèdent une antenne satellite et nous apercevons déjà quelques maisons de plain pied avec des structures béton et des murs en plots gris, sans enduit, nous laissant imaginer que le charme de ces villages aura disparu à jamais dans quelques décennies à peine. Comme en Bolivie, en l’absence de quelques règles élémentaires de construction - qui sont naturellement bien loin des préoccupations d’un pays émergent -, le paysage urbanistique risque d’être bouleversé pour bien longtemps.
Après l’avoir traversé, nous quittons le village avec Kham Seng et au fil de notre progression, nous sentons que nous pénétrons dans la jungle. Gautier emboite le pas du maître d’école et nous tracerons directement jusqu’à la chute puis au lac en contrebas.
Le chemin est particulièrement bien aménagé pour ce pays pauvre, grâce à l’intervention d’un anglais qui a fait aménager ces kilomètres de sentier avec des dalles en ciment disposées comme des pas japonais, de très nombreuses marches maçonnées à l’aide de briques rouges et un certain nombre de passerelles… même si l’état de certaines laisse maintenant un peu à désirer, faute d’entretien.
Nous ferons un stop dans la petite gargote au bord du lac pour partager avec lui un coca avant de repartir. Là, un homme discutera un moment en français avec nous. Il l’a appris, à raison de 2 heures par semaine pendant 4 ans, entre 1969 et 1973, et sans jamais avoir mis un pied en France, il parle admirablement bien le français. Une heure après nous serons de retour au village.
Nous nous asseyions un instant à l’ombre, à même une paillasse sous une de ces maisons sur pilotis qui procure un espace abrité où les habitants ont visiblement l’habitude de travailler ou de se détendre. La récolte du riz a eu lieu en octobre dernier et si les champs portent encore les stigmates de la récente fauche, les habitants, eux, ont commencé le travail de séchage, de sélection et de mise en sac.
Un homme prépare de nouveaux tamis pendant que d’autres sélectionnent les grains.
Il est bientôt 13h30 et nous devons nous diriger vers l’école. En chemin, El Gringo et The Artist tentent de se faire comprendre de Kham Seng en lui demandant d’apprendre aux enfants de ne pas jeter les déchets sur la voie publique et de disposer quelques poubelles… pour la nature, pour le futur !
A la vue de notre arrivée à proximité de l’école, les enfants ont reconnu leur maître… accompagné de notre petite famille. A la fois intrigués et amusés, ils courent dans tous les sens et crient à tue-tête des mots incompréhensibles pour nous. L’excitation est à son comble jusqu’à ce que Kham Seng demande aux enfants de se regrouper devant le mat en haut duquel flotte le pavillon laotien. Ils s’exécutent à vive allure et, bien rangés comme pour une photo de classe, ils se mettent à entonner un chant à notre attention en tapant dans leurs mains. Nous sommes très émus de voir ses bambins chanter avec tant de gaieté et d’application. Nous ne comprenons rien mais leurs sourires et leur joie sont bien suffisants pour laisser transparaître un message haut en couleurs. Nous immortalisons l’instant et chipons un petit bout de cet instant magique en les filmant quelques secondes…
Puis Kham Seng retourne dans sa classe un instant et en ressort avec un ballon de foot. Il forme sur le champ deux équipes et propose à Gautier de rejoindre l’une d’elles. Il se démènera comme un diable, le sourire aux lèvres, pour faire marquer des buts à son équipe.
De l’autre côté de la cour, Lovely montre des photos de la neige et de Combloux aux enfants entourés de leur maître. L’une des fillettes, la plus grande, âgée de 7 ans, dira qu’elle a déjà vu la neige et le ski et à la télévision.
Nous prendrons une série de photos follement amusantes, pour les enfants comme pour nous… et nous garderons à jamais en souvenir les sourires de ces petits bouts.
Les filles, excitées comme des puces, s’avançaient vers l’objectif comme pour le dévorer… ou pour être certaines d’être photographiées !! C’était simplement fou de lire cette joie sur leurs visages.
Nous leur apprendrons à dire « Bonjour » (Sabai dee en laotien) et « Merci » (Khop chai)… des mots qu’ils répètent avec tellement d’assiduité et d’envie que nous finirons par leur apprendre à dire « Combloux » !
Il est maintenant l’heure de travailler un peu et nous pensions devoir les quitter mais Kham Seng nous explique que le vendredi après-midi est consacré aux travaux extérieurs et à l’entretien de l’école. Aujourd’hui, au programme, le démontage de la clôture d’enceinte de l’école afin de la remplacer. Le match de foot est arrêté et les enfants, agés de 6 ans en moyenne, se munissent de machettes et se mettent au travail dans la joie, le sourire aux lèvres. Très volontaires dans leur manière de procéder, ils s’évertuent à démonter les bambous cloués sur les poteaux. Nos 3 garçons se mettent immédiatement au travail avec eux et le chantier joyeux progresse à vive allure. Nous sommes ravis de pouvoir participer et Kham Seng semble touché par notre geste volontaire.
Après une grosse heure de travail, le cœur à l’ouvrage, la barrière est démontée, les bambous et les vieux piquets pourris sont alignés près du foyer extérieur et les herbes ont été fauchées le long de la clôture.
Avant de quitter cette petite troupe si attachante, nous ferons une photo de classe devant l’école.
Kham Seng nous demande de lui envoyer pour qu’il l’accroche dans l’école. Nous rentrerons dans la salle de classe pour qu’il nous écrive l’adresse de l’école en laotien puis BG fera un passage au tableau pour faire des opérations de calcul avec les jeunes élèves.
El Gringo avait lu dans un guide que seul le maître d’école ou le chef de village pouvait recevoir de l’argent alors, avant de partir, nous laissons à Kham Seng quelques billets pour qu’il achète des cahiers, des stylos et des livres aux enfants. Le Laos est un pays où la corruption est reine mais après ce temps de partage, nous espérons que notre geste sera utilisé à bon escient. BG avait également récupéré 3 coloriages lors de notre vol Nouméa-Sydney qu’il avait réservés pour ce type de rencontre. Nous prévenons Kham Seng que nous irons les porter à l’école demain samedi et que, comme l’école sera fermée, nous les glisserons à travers les parois ajourées des murs. C’est BG et Lovely qui referont le chemin aller-retour jusqu’au village demain matin.
Il est maintenant temps de partir. Kham Seng nous fait comprendre qu’il est touché par notre implication et notre émotion de le quitter est vive.
Chacun des garçons tapera dans les mains de tous les enfants pour un au revoir chaleureux et touchant.
Lorsque nous franchissons le portail d’entrée, les enfants scanderont : « Combloux, Combloux, Combloux,… ». On se demande bien qui a pu leur apprendre ce mot là !! Et même, lorsque nous disparaitrons de leur vue, lorsque le chemin de terre bascule derrière le premier coteau, nous entendrons encore quelques Combloux…
Sur le chemin, El Gringo et The Artist parlent de ce bel après-midi passé et BG me dira qu’il aimerait bien avoir une école comme celle-là… il préfère de loin manier la machette que le stylo Bic !!
Nous serons de retour au lodge vers 15 heures pour grignoter un petit morceau et prendre une bonne douche. Nous travaillerons une bonne heure puis chacun de nous profitera d’une séance de massage de 30 minutes… à 3,50€. Un massage à l’huile, beaucoup plus doux et plus agréable encore que les précédents.
Nous finirons la journée en nous détendant dans un hammam « maison » - chauffé au feu de bois et parfumé aux herbes du potager – où une famille anglaise, partie elle aussi pour 6 mois, nous rejoindra. En plongeant dans la piscine, juste après notre séance, je partagerai une nouvelle fois avec les garçons la chance inouïe que nous avons d’être là. BG me dira que son rêve serait tout de même que le télésiège de Beauregard soit juste derrière la piscine…
Pour le dîner, nous nous régalerons de différentes soupes locales. Tout est cuisiné par l’amie laotienne de Sam, le gérant français du lodge, qui a déjà bien bourlingué le monde et a décidé de se poser ici pour quelque temps.
Nous avons encore passé une journée pas tout à fait ordinaire…
... et pensons bien à vous en vous transmettant la joie de ces bambins.
Victorinox