Le paradis jusqu’à la lie !
Samedi 19 juillet – 8h40 dans le bus « El Rapido » pour Valparaiso…
A cette heure, il faut que je mette un peu d’ordre dans ma petite tête car j’ai plein de trucs à vous raconter avant de clôturer l’Argentine. Je crois que je le ferai en plusieurs billets même si celui-ci sera surement assez long…
Reprenons… ce matin, nous sommes installés dans le bus tout jaune de la compagnie « El Rapido ». A l’étage, en classe semi-camas (comprenez siège qui se transforme en demi lit). C’est la catégorie moyenne comprenant un siège avec un dossier basculant et un repose pieds extra large. Une fois installés, nous avons une assise très allongée… sans être complètement à l'horizontale mais très confortable… et avec de la place. Nous ne sommes plus en Bolivie. Nous voilà partis pour un voyage de 8h qui devrait être chouette puisque nous allons traverser une nouvelle fois, et plus au sud, la cordillère des Andes. Une cordillère toute blanche en ce moment.
Le bus quitte le terminal que nous avons rejoint à pied avec nos sacs. L’hôtel était à 15mn de marche. Le jour se lève à peine. Il fait nuit jusqu’à 8h ici à cette saison. Le ciel est tout dégagé et au loin, nous voyons le géant des Andes, le volcan Tupungato, que nous avions en ligne de mire depuis quelques jours, juste devant notre paradis de la vallée de Uco. Les montagnes sont enneigées et le décor s’annonce grandiose.
8h, ça peut sembler long mais en réalité le spectacle nous occupe. Et puis, nous avons pris l’habitude de ces voyages en bus et finalement, ils vont nous manquer. Lorsque vous réservez votre voyage, vous pouvez choisir votre siège. Les gens s’entassent tout le temps à l’avant pour être proche du grand pare-brise de l’étage. Nous, nous prenons toujours les places du fond du bus, peut-être une vieille habitude scolaire… ? Mais à chaque fois, cela nous permet de prendre nos aises. Nous occupons tous un siège double et les garçons sont déjà vautrés pour continuer la nuit trop courte à leur goût.
Le bus roule sereinement, il n’y a pas de bruit et une petite musique sud-américaine nous berce et laisse aller nos songes…
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Cette atmosphère douce me fait repenser à Atamisque. Je voudrais vous reparler un peu de notre paradis. Nous l’avons quitté hier vendredi vers 17h30 après en avoir profité 3 jours pleins. Et il nous laissera des souvenirs plein la tête. Atamisque regroupe en un même lieu, sur 800ha, des activités touristiques et commerciales. Le décor est brut, en pleine nature et en même temps, rien n’est trop surfait puisque l’activité économique de la bodega, de la pisciculture, des vergers, châtaigniers et autres noyers donne un sens à tout ce qui nous entoure. Le propriétaire des lieux, John, un français d’origine belge est un ancien grand professionnel du tourisme. Président du groupe Accor en Amérique du Sud, il a décidé il y a 10 ans d’organiser son projet de retraite ici… loin de la France, loin de sa ville de Nantes et fait du hasard, loin de sa maison de famille de l’île de Noirmoutier !! Une attache insulaire commune qui nous a forcément fait sourire. Ils ont justement quitté Atamisque en ce moment pour passer tout l’été à Noirmoutier, tout proche de notre maison. Amusant et touchant, nous qui sommes en ce moment si loin de cette île que nous avons la chance d’apprécier et de chérir chaque été. Ce petit détail nous a probablement encore un peu plus attaché à ce paradis. Nous nous y sentions un peu comme chez nous. Il faut dire que nous étions les seuls hôtes du domaine. Seuls sur le golf, seuls au tennis, seuls dans la petite salle du lobby servant au petit déjeuner et au diner. Nous étions comme à la maison… avec en plus le luxe de ne rien faire et de se laisser faire. Lorena, n’aura eu de cesse de faire plaisir aux garçons pour les repas jusqu’à leur préparer des crêpes pour le dernier soir. Meilleures que les miennes, j’en ai perdu mon statut de « roi des crêpes » !!
Vendredi matin, nous avions prévu une visite de la bodega et Anaïs, à l'accueil, s’est arrangée pour que Javier, qui parle parfaitement le français, nous accompagne afin que la visite soit plus vivante pour les garçons.
Nous avons passé 2 heures avec lui dans les bâtiments ultra-modernes de la bodega Atamisque. A taille humaine et privilégiant un travail qualitatif, la bodega possède 400ha de vignes et produit 400 000 bouteilles par an… bien loin de la production intensive de la bodega Trapiche qui affiche 20 millions de bouteilles annuelles. Avec passion et amour du vin, Javier nous a décrit chacune des étapes nécessaires à l’élaboration des vins de la bodega. Cueillette à la main, double tri manuel des grappes puis des raisins, progression gravitaire du précieux breuvage dans les différentes étapes de production, attention particulière à tous les stades, installations ultra modernes et tout inox, fûts en chêne français, bouchon de liège espagnol, tout est fait ici pour tendre vers l’excellence. Et les efforts ont payé l’année dernière puisque la bodega Atamisque s’est vu gratifiée d’une note de 93/100 par le guide Parker pour son Malbec Atamisque. C’est la meilleure note jamais obtenue pour un Malbec argentin. Le meilleur malbec argentin provient donc de la finca Atamisque !!
Javier, adorable, est ravi de pratiquer son français. Il prend son temps et nous emmène à l’étage inférieur de la bodega, au pied des énormes cuves inox de 9 700 litres. Il nous fera goûter plusieurs des 10 cépages du domaine, tantôt tirés directement de la cuve inox, tantôt de la bouteille finale pour nous montrer l’évolution jusqu’au vin commercialisé. Les garçons gouteront aussi et apprécieront… une éducation du palais et du nez distillée à petites doses par leur grand-père « pinoum » depuis leur plus jeune âge. Nous finirons dans la salle de dégustation pour goûter le pinot noir de la gamme Catalpa ou encore le Viognier de la gamme Serbal. A 11h30, nous repartons à VTT vers les lodges, à l’autre bout du domaine. Nous traversons les vignes et entre 2 allées, nous comptons les plants. 9 000 à gauche, autant de l’autre côté. Ici, c’est du Malbec, là, c’est du Cabernet franc. Puis les vergers. Cerisiers, pommiers, châtaigniers, noyers. C’est l’hiver ici. Il n’y a pas de feuilles sur les arbres et c’est déjà superbe… qu’est-ce que cela doit être au printemps ou à l’automne lorsque les couleurs chaudes apparaissent… ? Paola, qui s’occupe des petits déjeuner et qui reste jusqu’au début d’après-midi au lobby de l’hôtel, avant l’arrivée de Lorena, nous a préparé un plateau de fromages, des olives vertes et noires et du pain frais pour grignoter ce midi. Elle a même déjà installé la table sur la terrasse devant notre lodge. Tout est prévu pour 14h. Nous avons juste le temps de faire un dernier golf en amoureux avec Lovely pendant que les garçons filent jouer au tennis à vélo. Nous grimpons dans la voiturette de golf qui a été mise à notre disposition et profiterons du golf, juste pour nous !
Retour aux lodges avec les enfants, déjeuner de fromages avec une bouteille de Pinot noir Serbal. A 15h30, nous avons rendez-vous avec Anaïs qui doit nous faire visiter les étangs de la pisciculture du domaine, à l'autre extrémité de la finca. Depuis leur stade d'alevin, ce sont en tout 60 000 truites qui sont dorlotées par Francisco durant un an pour qu'elles atteignent leur taille adulte de commercialisation. Très belle installation avec tous les bassins où évoluent des truites de toutes les tailles. Toutes les truites que nous trouvons dans les restaurants de la région de Mendoza proviennnent d'Atamisque.
Retour aux lodges... et même le temps de nous faire un petit jacuzzi avant de boucler les sacs.
Nous buvons du vin quasiment en intra veineuse ici et finirons la bouteille de Pinot Noir les pieds dans l’eau. Il est 17h30. « Vamos », il faut y aller. Nous avons dit au revoir à Lorena hier soir après notre dernier diner et les super crêpes et avons fait une petite photo avec émotion. Elle venait de nous dire qu’elle aimerait que tous les clients soient aussi accessibles que nous… tant il est vrai que nous avons bien discuté ensemble durant ces trois soirées partagées. Nous échangerons ces petits mots sensibles entre nous transformant ce départ en une déchirure. Lovely retiendra quelques larmes. Chouette moment de complicité et de partage.
Cet après-midi, c’est Paola qui fera un bout de chemin avec sa voiturette de golf de « fonction » pour un dernier au revoir aux portes du domaine. Même les chiens, Adolpho, Malbec et Anna qui nous auront suivi durant tout notre séjour courront à côté du Duster jusqu’à la sortie pour un dernier câlin avec les garçons.
Ça et tout le reste nous laisseront ces souvenirs mémorables. Nous avions besoin de ce temps de pause après presque 60 jours de trip sans avoir arrêter de courir pour découvrir le bout de ce continent.
Nous avons profité de ce paradis jusqu’à la lie !
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Revenons à notre dernier grand voyage en bus. A 9h, nous sommes déjà dans les montagnes. La route serpente dans cette vallée le long d’une rivière qui me fait penser à l’Arve chez nous. La montagne est proche, sa roche prend des reflets rougeoyants, elle est déstructurée, friable et la végétation est quasiment absente. Quelques buissons verts et touffes d’herbes hautes jaunes colorent un peu le sol sédimentaire sur lequel trônent quelques éboulis plus massifs. Quelques kilomètres plus loin, la vallée est maintenant toute rouge, plus étroite et nous franchissons quelques tunnels sur cette route qui surplombe la rivière, en contrebas.
La vallée se réduit davantage, puis s’élargit, puis se resserre encore. Au fond, les monts sont enneigés. Nous devons nous rapprocher de la frontière et avant, de la station de ski de Los Penitentes dans laquelle nous avions hésité à nous rendre pour faire 2 ou 3 « leuquées et viroleux avec nos palins » mais il n’y avait soit disant pas assez de neige. Elle est pourtant tombée le lendemain mais nous avions déjà posé nos valises au paradis… c’est aussi le destin qui décide de notre voyage !!
Les couleurs et les formes des montagnes qui nous entourent sont magiques. Le spectacle prévu se révèle au fil des kilomètres.
Suite à l’érosion, les sédiments qui glissent des sommets des montagnes forment de larges cônes de couleurs différentes et proposent à nos yeux un spectacle surprenant avec leurs pentes enneigées.
Il est 11h et la lune fait toujours le voyage à notre côté. Tout est blanc même si la quantité de neige est très faible. Nous traversons les petites installations de ski de Los Penitentes. Il y a en effet, peu de neige ici, les pistes au bord de la route peinent à rester ouvertes… dur, dur !
Sur le bord de la route, une cascade de glace. Des alpinistes en ont fait leur terrain de jeu pour la matinée. Ce qui nous frappe le plus est l’ambivalence du décor de chaque côté de la route. A droite, face nord, tout est blanc ou presque alors que de l’autre côté de la route, à gauche, face sud, la montagne est sèche, aride et colorée de d’ocre et de jaune.
La route ne cesse de monter sans faire de grands lacets. Elle se fraie un passage entre les montagnes. La voie de chemin de fer désaffectée que nous longeons depuis un bon moment s’est rapprochée de nous. Les passages semblent s’étriquer de plus en plus entre les montagnes mais ça passe… un, deux puis trois tunnels. Nous sentons l’atmosphère de l’altitude. Le chasse neige a laissé un épais bourrelet de neige sur les bords de la route. Puis, ça y est, nous sommes à la frontière chilienne. Un panneau vient d’indiquer que nous sommes à 205 kms de Valparaiso. Le bus s’arrête. Il y a beaucoup de voitures et de bus en file indienne. Nous comprenons que nous allons passer un moment ici. Puis le bus entre dans le grand hangar de contrôle douanier et le chauffeur vient nous informer qu’il faut descendre et nous diriger vers les postes administratifs.
1h30 de queue et de contrôle des bagages puis nous pouvons enfin remonter dans le bus et repartir.
A peine, la frontière passée, une nouvelle petite station, Portillo, plus enneigée celle-ci. Les premiers skieurs, au loin, soulèvent de la poudreuse en marquant leurs courbes dans la pente. Puis les télésièges passent au dessus de la route. L’envie de skier est forte, surtout pour les garçons. Si nous avions su, nous aurions pu nous organiser pour passer une journée ici… nous ferons du ski ailleurs, une autre fois.
Les virages en épingle très serrés se suivent de très près. Le bus descend tranquillement, au frein moteur.
Nous ferons ainsi les kilomètres nous reliant à la plaine puis nous roulerons sans relâche jusqu’à Vina del Mar puis 15 mn après, Valparaiso.
Ca sent l’iode. La mer est juste là, devant nous… les montagnes des Andes, elles, sont loin, très loin... trop loin? Nous ne les traverserons plus maintenant. Maintenant, nous resterons en contact avec le Pacifique pour plusieurs mois…
Victorinox... en route pour le Pacifique