De Pototsi à Uyuni, pas d’ennui !
Nous passons notre seconde et dernière journée à Potosi. Après l’épique visite d’une des mines hier, la journée d’aujourd’hui sera plus cool avec en fin de journée une parenthèse tranquille pour regarder le match France-Equateur. Mais avant, une petite matinée culturelle s’impose avec la visite de l’Hôtel de la Monnaie de Potosi. « La Casa de la Moneda » est le plus grand et le plus important bâtiment civil colonial des Amériques.
Un guide est de rigueur pour comprendre toute l’histoire assez incroyable de ce qui s’est passé ici… la notre parle un français parfait puisqu’elle a passé une année en France comme fille au pair. Non les garçons, n’imaginez rien, elle n’a rien du stéréotype de la fille au pair et pourtant elle se prénomme… Edith !
Bref, une superbe visite dans le monument phare de la ville qui est un des plus beaux musées d’Amérique du Sud et durant laquelle nous avons appris énormément.
Il y avait tellement d’argent dans les mines de Potosi que c’est ici que la monnaie était fabriquée à destination de l’Espagne bien sûr, mais aussi de toutes les colonies hispaniques à travers le monde. Les premières pièces ont été fabriquées en 1572. Puis entre 1759 et 1773, fut édifié ce nouvel Hôtel des Monnaies pour contrôler la frappe des pièces coloniales.
Les murs de l’édifice font plus 1m d’épaisseur et ce bâtiment splendide renferme des trésors historiques.
C’est dans cet édifice aux charpentes et planchers d’origine, que nous avons appris comment les lingots d’argent étaient coulés ici avec l’argent des mines de Potosi.
Il était parmi les plus purs du monde. Dans l’hôtel, ces lingots étaient ensuite laminés à l’épaisseur des pièces, découpées et frappées sur d’antiques matrices servant à façonner les pièces. Pour le laminage, des machines impressionnantes, constituées par des engrenages en bois étaient mues par des esclaves d’abord, puis des mules ensuite.
Des pièces qui voyageaient ensuite dans des coffres aux serrures extrêmement complexes (et réalisées en argent, tant il y en avait), pendant 3 mois afin de rejoindre Arica sur la côte Pacifique pour être chargées dans des galions jusqu’à Panama.
Le canal n’existant pas à l’époque, les coffres y étaient déchargés puis transportés par voies terrestres jusqu’au bord de l’Atlantique, rechargés sur un galion et naviguaient ainsi jusqu’en Espagne. Il fallait compter entre 12 et 14 mois pour que les pièces frappées à Potosi arrivent sur le sol espagnol.
On frappait ici environ 6 000 pièces par jour.
Pour augmenter encore la cadence, les engrenages en bois furent remplacés par des machines à vapeur au XIXème siècle puis électriques enfin. On frappa la monnaie à Potosi jusqu’en 1953.
On aura aussi appris que cet hôtel de la monnaie est à l’origine de l’appellation de la monnaie américaine, le dollar, et que le signe $ existe en référence au logo frappé sur chacune des pièces frappées à Potosi.
Après avoir déjeuner dans un restaurant du cœur de la ville (entrée, soupe, plat et dessert pour 2€), nous trouverons un petit bar pour regarder le match en compagnie de 3 jeunes bretons et un couple de belges.
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Ce matin, jeudi, nous sommes dans un nouveau bus (ou plus exactement à nouveau dans un bus car celui-ci n’est pas tout jeune) en route pour Uyuni. Les 3 jeunes bretons font le voyage avec nous. 4h de trajet pendant lesquels nous passerons un nouveau point culminant jamais franchi pour nous à… 5 300m d’altitude ! La tête est un peu lourde. Quelques nausées aussi. Les effluves et émanations de toutes sortes dans ce bus n’aident pas vraiment non plus. Ma voisine, 60-65 ans, le visage buriné par le soleil plonge une cuillère à soupe dans un sac en plastique posé sur ses genoux. Des pommes de terre cuites à l’eau baignent dans une sauce avec des morceaux de viande ou d’abats, je ne sais pas. Ce que je sais, c’est qu’à 10h du matin et à plus de 5 000m, je ne saurai pas apprécier. Pas du tout !
De temps en temps, elle recrache quelques résidus dans un autre sac.
Le bus s’arrête à l’entrée d’un petit village aux maisons construites en briques de terre. Ma voisine se lève et sort du bus. Elle s’arrête à côté d’un muret au bord de la route, visible du bus. Elle passe ses mains sous la jupe longue plissée marine qui cache les bas de laine gris qu’elle porte. Elle farfouille là-dessous puis écarte un peu les jambes. A priori, c’était une pause « pipi » !! Une fois terminée, elle balayera le sol d’un mouvement rapide de ses deux sandalettes. Affaire terminée ! Elle remonte dans le bus et s’assied à mes côtés comme si de rien n’était. A cet instant, je me rends compte à quel point, je suis loin de vous !
Le trajet se passe bien. La route est belle, ça rassure, et surtout, les paysages sont somptueux. On en prend plein les mirettes une nouvelle fois.
Imaginez évidemment une route sinueuse, mais sans épingle à cheveux comme chez nous, de bonne largeur et avec un excellent revêtement. Même le marquage au sol est parfait.
Dans le bus rempli, tout est plutôt calme. Les boliviens et boliviennes dorment presque tous. Il y a beaucoup de vent sur les hauts plateaux. Les vitres du bus ne sont pas hermétiques et le vent siffle à l’intérieur. Les rideaux verts qui nous protègent du soleil ondulent harmonieusement. Sur ces plateaux, le bus roule vite. Trop vite. Il est à plein régime et nous n’avons qu’à espérer qu’aucun incident technique ne survienne car son contrôle serait peine perdue.
Notre route suit les contours de chacune des montagnes qui constituent la chaine andine que nous traversons. Nous franchissons les cols mais toujours sur des pentes régulières. Dans ce paysage, la route est comme un fil que l’on déroule à flanc de montagnes. Le paysage est montagneux certes, avec des vallons et plis multiples mais tout cela est doux et harmonieux. Même si le paysage est désertique, on aperçoit de temps en temps un peu de végétation. De tout petits arbustes parsèment les montagnes. De temps en temps quelques cactus ou quelques névés en fonction de l’altitude et de l’exposition au soleil.
Et puis les couleurs. Elles sont sublimes. Ciel bleu, pas un nuage ou si peu. Et les montagnes, plutôt rouges, se découpent parfaitement sur ce fond azur. Mais si au premier plan, la terre est ocre, au second plan, les roches alternent avec des tons bleu gris. Et là, le long de la route, apparaît une rivière dans un lit très large et qui semble toujours démesuré à côté du débit de l’eau. Un lit de sable gris ourlé de blanc, comme du sel, le long du fil de l’eau. Cette blancheur donne au tableau que nous avons sous les yeux un décor de rêve. Comme pour donner un caractère vivant au tableau, quelques lamas viennent s’abreuver dans la rivière…
Nous faisons beaucoup de kilomètres et le cadre, même s’il change un peu, reste magique. Pourtant, ces régions restent hostiles, enclavées ou tellement éloignées. Tout est brut. L’homme ne semble même pas pouvoir y habiter. Hormis la route, pas de trace de civilisation, pas de trace de pollution humaine…
La couleur blanche est bien probablement du sel puisque Uyuni ou nous dormirons ce soir, est la porte d’entrée du Salar, le plus grand désert de sel du monde.
Nous prévoyons de le traverser pendant 3 jours et 2 nuits en 4 X 4. Au terme du périple, nous franchirons la frontière chilienne à San Pedro de Atacama. Mais avant, il nous faudra affronter 2 nuits dans le désert dans de petits hôtels non chauffés et la température nocturne tombe souvent à -15 et -20°C !!! On risque bien de se meuler les amis…
Nous sommes dans les derniers virages et soudain, s’ouvre à nous une vallée immense, toute plane. Quelques petits sommets au loin, très loin. Un décor qui change radicalement.
Une vallée blanche… mais rien à voir à celle de Cham !
Au milieu, une petite ville. Uyuni, notre destination. Lovely Planet nous a trouvé un hôtel sympa avec une grande chambre familiale pour la nuit… avant d’affronter la rigueur des nuits dans le Salar. Dès que nous prendrons possession de notre chambre, je vous envoie ces quelques lignes.
Nous vous embrassons bien fort. A bientôt.
Victorinox